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Sa Signification :

Tanit., en phénico-punique : Tnt, exceptionnellement Tynt ou Tmt, est un théonyme sémitique qui pourrait se rattacher au piël tanne du verbe tny, « se lamenter », « pleurer ». Dans cette hypothèse, la «  tan nît » serait une « pleureuse » et l'acception première du terme pourrait se faire jour, au Xe/ IXe s. av. J-C, dans une inscription en pseudo-hiéroglyphes louvites de Til- Barsip, où le mot ta-ni-ti, par ailleurs inconnu en : louvite, désigne une hiérodule consacrée au dieu de l'orage . Cette interprétation rendrait intelligible le nom complet de la Tanit punique « Pleureuse en face de Baal », et se rattacherait à la tradition iconographique de la Venus lu gens.

En tout cas, l'explication du nom de Tanit. à partir du Libyque ne saurait plus être retenue, puisque le théonyme apparaît d'abord en Orient. Par ailleurs, sa dérivation du nom d'Anat ('nt) est philologiquement insoutenable et l'on ne peut prendre au sérieux son interprétation dans le sens d'un féminin de Tannin, nom d'un dragon marin de la mythologie ouest- sémitique.

 

Sa Diffusion :

 

Le théonyme Tanit est attesté en Orient à partir de la première moitié du VIe siècle av. J-C., mais n'apparaît à Carthage qu'à la fin du Ve ou au début du IVe s av. J-C.

Il se manifeste d'abord dans le théonyme double Tnt- 'strt, « la Tanit d'Astarté », sur une plaquette provenant d'un petit sanctuaire de Sarepta , et dans l'anthroponyme Gr-Tnt (« Client/Fidèle de Tanit »), attesté à Sidon et à Kition. Le théonyme apparait ensuite sur une lampe à huile d'époque perse, dans le nom propre du Sidonien « bd-Tnt » (« Serviteur de Tanit »), gravé sur une stèle d'Athènes, et sur des tessères du IIIe/IIe s av.J-C , où il est écrit Tmt. Ces tessères portent l'épigraphe bn(t) Tmt, « crypte de Tanit », référence probable à une salle souterraine, où devaient se tenir les banquets sacrés.

Par ailleurs, la toponymie libanaise ('Aqtantt, 'Aïtantt, Kfar Tantt) a gardé la trace du culte de Tanit et son épithète Pane Baal se retrouve au IIe s. ap. J .C. sur des monnaies d'Ascalon.

En Occident, le nom de Tanit n'apparaît sur les stèles de Carthage que vers 400 av. J-C et y précède constamment le nom de Baal Hamon . En dehors des inscriptions du tophet de Salammbô, on ne rencontre que la « Tanit du Liban », mais le culte de Tanit a atteint aussi «  Thinissut » , Hadrumète , Constantine, Malte, Tharros , Nora , Lilybée , Palerme et Ibiza, où la grotte d'Es Cuieram lui était consacrée. Il convient d'ajouter à cette liste tous les sites africains et autres où l'on vénérait la Junon Caelestis, dont l'identité recouvrait celle de Tanit, à l'époque romaine.

 

Le culte de Tanit :

 

Le culte de Tanit est généralement associé à celui d'Astarté , tant à Sarepta qu'à Carthage et à Malte . Le nom double de « Tanit d'Astarté », qui livre la plus ancienne attestation du théonyme, paraît même indiquer que Tanit est une hypostase d'Astarté, incarnant la déesse associée au dieu de la végétation. Certaines monnaies de Malte et d' Arqa la figurent drapée dans un vêtement de deuil et un autel romain des environs de Byblos la représente en Venus lugens à côté d'un Osiris gainé (Sadambaal) , dans la fonction d'Isis .

Effectivement, la Tanit d'Hadrumète et d'Ibiza est assimilée à Isis, voire à l'Isis ailée qui protégeait de ses ailes la momie d'Osiris . Vingt-six types différents de figurines provenant de la grotte d'Es Cuieram représentent Tanit vêtue d'une chape à ailes repliées, habit que porte également l'image idéalisée de la prêtresse carthaginoise, sculptée en relief sur son sarcophage. C'est une Tanit drapée dans un vêtement de deuil qui semble apparaître aussi sur une stèle d'Hadrumète remontant au IVe s. av. J-C. Cette caractéristique lui confère les traits d'une déesse chthonienne, ce que confirme son assimilation à Artémis, impliquée par l'anthroponyme de la stèle d'Athènes, de même qu'à sa suivante Aréthuse , dont l'image sert probablement d'effigie à Tanit sur les monnaies siculo-punique.

Ses épithètes de « Mère » et de «  Nutrix » sou1ignent pareillement sa nature de déesse chthonienne, tout comme Kourotrophos, "Nourrice", servait d'appellatif aux déesses chthoniennes.

Déesse suprême de Carthage, Tanit devint la Déesse ou la Junon Céleste de l'époque romaine., mais aussi la Vierge Céleste, appellatif qui évoque moins sa fonction astronomique parmi les signes du zodiaque que sa nature de vierge- mère, de « Nourrice de Saturne », dont la sève juvénile régénère la puissance du dieu de la végétation, tout comme Isis le faisait pour Osiris.

Rien n'indique en effet que Tanit était l'épouse de Baal (Hamon). Elle était sa parèdre, qui le faisait renaître, périodiquement, d'une terre revigorée (Dagan).

Aussi fut-elle intimement associée au culte agraire lié au sacrifice molk. Le « signe de Tanit » accompagne souvent la mention de Tanit, mais il apparaît aussi indépendamment de la déesse et ne constituait donc pas, semble- t-il, un symbole issu du culte de Tanit.

 

Le signe de Tanit :

Sans qu'on puisse affirmer qu'il se rattache à Tanit, il est le symbole le plus fréquemment représenté sur les stèles votives d'Afrique du Nord, retrouvé à des milliers d'exemplaires aussi sur d'autres supports très divers: figurines, amulettes, pavements mosaïqués, et même sur des tessons de céramique sur lesquels on le voit figurer gravé à la pointe sèche, comme un graffito. Avec de nombreuses variantes de détail, il reproduit un schéma simple, celui d'un triangle (plus rarement d'un trapèze) sur la pointe duquel repose une barre horizontale (aux extrémités parfois relevées), elle-même surmontée d'un cercle ou d'un; disque. L'ensemble suggère la silhouette stylisée d'une figure féminine représentée en frontalité, les bras étendus. Et il est des cas - assez rares cependant - où l'addition de détails significatifs contraint à une lecture anthropomorphique.

L'origine de ce «signe de Tanit» a suscité maintes discussions. On y a vu parfois une déformation de l'ankh, la croix ansée égyptienne, symbole de vie, et , il n'est pas de fait impossible que l'idéogramme égyptien soit sous-jacent à la stylisation du «signe de Tanit». On s'accorde maintenant en général à penser que le signe provient d'une schématisation de la figuration réaliste soit de l'image syro-cananéenne de la déesse représentée nue en frontalité, se pressant les seins, soit encore de celle: des hiérodules aux bras étendus, l'une et l'autre fréquentes en Orient à la fin de l'âge du bronze.

Reste le difficile problème des motivations de l'élaboration de cette figuration schématique, et de sa chronologie. On a été amené à considérer que cette abstraction correspond au besoin d'exprimer par un symbole simple mais fortement polysémique, une pluralité d'intentions ou de compréhensions religieuses le «signe de Tanit», d'une variante à l'autre, est tout à la fois l'emblème d'un orant ou d'une orante, ou celui de la divinité destinataire de l'oraison; on peut y voir le dessin d'un cippe autel (pour sa partie inférieure), la symbolisation du croissant lunaire et du disque solaire (pour sa partie supérieure) .On a été tenté d'y reconnaître une création originale de l'élite sacerdotale de Carthage, qu'on a proposé de situer dans les premières années du IV e siècle av. J-C.

 

Sa valeur :

La valeur de ce signe réunirait deux idées fondamentales présentes dans la religion phénico-punique, celles de la vie et de la fécondité liées à la notion de salut souhaité lors du sacrifice.

Le signe de Tanit serait alors un intermédiaire entre le monde terrestre et le monde céleste figuré par le croissant et le disque. En Numidie, à partir du IIe siècle av. J-C, il ne serait plus qu'un intermédiaire abstrait entre le dieu Baal Hamon et le dédicant. À cette époque, l'anthropomorphisation du symbole pourrait n'être, enfin, que le simple figuration du dédicant.

Sarepta : aujourd'hui Sarafand, ville située au cœur de la Phénicie proprement dite, identifiée avec les ruines mises au jour sur le promontoire de Ras el-Qantara, à 13 km au sud de Sidon, juste au nord du village moderne de Sarafand(Liban).

Tessères : Les tessères sont des espèces de jetons d'entrée qui servaient de tickets d'admission aux banquets rituels, ou aux jeux théâtraux et sacrés.

Pane Baal : Epithète habituelle de Tanit dans les inscriptions puniques, en particulier celle de Carthage. La traduction habituelle est peyu satisfaisante de pn B'l est « face de Baal », mais le sens primitif de l'expression est vraisemblablement «  en face de Baal », puisque le mot pn peut s'employer adverbialement et signifier « dans le direction de », « devant »

Baal Hamon : Il est tout comme Dagon et Saturne, un dieu de l'agriculture et il apparaît sous les traits d'une divinité agraire.

Tophet : Les archéologues ont baptisé de ce nom les aires sacrées que l'on a retrouvées dans de nobreux sites phénico-puniques de la Méditerranée centrale et qui constituaient l'endroit où l'on accomplissait les sacrifices d'enfants et ensevelissait leurs restes brûlés.

Thinissut : aujourd'hui Bir Bou Rekba, à 5 km de Hammamet, en Tunisie.

Hadrumète : aujourd'hui Soussa, ville de Tunisie.

Tharros : Site d'origine nuragique ( appellation de l'ancienne civilisation de l'île de Sardaigne)sur la côte occidentale de la Sardaigne, à 20 km d'Oristano.

Nora : elle est la plus ancienne fondation phénicienne de Sardaigne, elle est située sur la péninsule de Capo di Pula, qui est rattachée à la côte méridionale de l'île.

Lilybée : aujourd'hui Marsala, ville située sur un promontoire, à l'extrémité de la Sicile occidentale.

Es Cuieram : grotte située au sommet d'une montagne au Nord-Est de l'île d'Ibiza en Espagne, à 200 m au-dessus de la mer.

Astarté : déesse attestée relativement tard, elle est mentionnée pour la première fois en Egypte en rapport avec la protection des chevaux, mais on la trouve ensuite à Ugarit comme déesse de l'amour et de la guerre.

Sadambaal : en grec et en latin Salammbô, qui veut dire « statue de Baal ».

Isis : grande déesse égyptienne, sœur et épouse d'Osiris, elle représente la force productive féminine de la nature.

Osiris : dieu égyptien symbolisant la fertilité masculine dans la nature et incarné dans la taureau sacré Apis.

Aréthuse : une des Hespérides : dans la mythologie grecque, filles de la Nuit(Nyx) et de l'Obscurité( Erèbe) qui vivaient à l'extrème occident, au bord de l'océan, gardant un arbre qui produisait des pommes d'or.