JCC
Le rideau tombe sur les JCC : Le cinéma a t-il gagné ?
Sans l’ombre
d’un doute ; nous dirons aujourd’hui, alors que vient de
s’achever la 22ème édition des Journées
Cinématographiques de Carthage, avec un palmarès, dont le
moindre des mérites, aura été, de clamer haut et fort,
l’indépendance du festival. Et ce n’est pas
rien.
ar, en refusant
d’octroyer un prix, aux courts-métrages (section vidéo), lors même
que sur les onze films annoncés, le jury n’aura pu en visionner que
dix, ce même jury aura contribué à relever la tête de la
compétition. Et des JCC par la même occasion. Qui ne se sont jamais
aussi bien portés, soit dit en passant.
Pour des raisons
évidentes, n’ayons pas peur des mots, un film a été censuré. Peu
importe sa nationalité et sa provenance. Ce qui compte aujourd’hui
et sans nulle démagogie, c’est qu’en étant isolé, il ne s’est pas
retrouvé seul…
Le cinéma qui fait de
la résistance ? Oui ; en affichant une belle vitalité, en
montrant qu’il sait être en prise avec son temps, en s’emparant de
la réalité pour en faire le matériau même de sa chair, son cœur
battant.
Parce que sa survie
tient aussi du fait qu’il sache prendre sa vérité, à bras-le corps,
rappelant, si besoin est, qu’il relève de l’art du vivant. Et c’est
ainsi que nous l’aimons.
Des œuvres fortes ont
été primées : « Teza » de l’éthiopien Haile Gerima,
« Leila’s birthday » du palestinien Rashid Masharaoui,
« Khamsa » du franco-tunisien Karim Dridi, ou encore les
deux films algériens qui ont bénéficiés, respectivement du prix
spécial du jury et celui de la première œuvre : « La
maison jaune » d’Amor Hakkar et « Mascarade » de Lyès
Salem. Cela, sans oublier les autres catégories de la
compétition.
Toutes s’inscrivant,
sous des formes diverses, de plain-pied dans leur propre terreau,
montrant la noblesse d’une lutte au quotidien, pour vivre tout
simplement. Et toutes, à des degrés divers, sont porteuses d’espoir.
L’Ethiopie à la plaie vive, en proie à toutes les misères,
la
Palestine blessée, saccagée, ulcérée, l’Algérie
trafiquée mais jamais lâche, le front toujours fier ; et la
misère des hommes, où qu’ils soient, d’où qu’ils soient, et leur
courage aussi pour faire face. Et puis l’enfance nue, et ses
silences.
Brassant large la
mémoire vive, la mémoire douloureuse des peuples, en optant d’emblée
pour une sélection, le moins que l’on puisse dire est qu’elle fût
effectivement heureuse, -abstraction faite des films tunisiens où il
n’y avait pas l’ombre d’un roi, ni d’un choix (autant pour nous en
attendant la prochaine cuvée)- cette dernière édition du doyen des
festivals de cinéma arabo- africain aura permis en substance, de
renouer avec une certaine idée du cinéma qui a, beaucoup à voir avec
la rigueur du traitement et la
pertinence du regard. N’oubliant pas au passage, cela qui est
essentiel : à savoir que le cinéma, ce n’est pas tant l’art de
l’esbroufe que celui du questionnement sur l’état du monde où nous
évoluons. Avec des images, mouvantes et émouvantes, qui nous
regardent autant que nous les regardons, nous arrimant, par delà le
rêve, à ce qu’il y a de plus vrai, de plus tangible, de plus
touchant, par delà toutes les latitudes, dans l’humanité des
Hommes.
Et puis ; il n’y
aurait que l’émotion et la gratitude d’un Sotigue Kouyaté, et d’un
Mohamed Bakri tel que nous l’avons toujours aimé, cette
22ème session vaudrait la peine d’être vécue.
Pour ces instants
volés, ne serait-ce justement que pour ces instants-là ; et
pour le jury des enfants, qui sont la relève de demain, saluons,
chapeau bas les JCC, leur diversité, et le courage d’avoir fait
front commun, contre la bêtise…
Samia HARRAR |
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