Fêter les 50 ans d’une manifestation culturelle comme les Journées Cinématographiques de Carthage
ce n’est certainement pas dérouler le tapis rouge, dresser des podiums, lancer des feux d’artifices ou
multiplier les mondanités et les soirées dansantes.
La liesse consiste d’abord à reconnaître ce qu’il y a d’irréductible dans les cinémas arabes et africains
en rappelant fièrement le combat des cinéastes tout au long de ces cinquante dernières années. Les
générations se sont succédées et le festival a entretenu comme il a pu, une inextinguible flamme. Le
rôle de cette édition anniversaire, consistera donc à la raviver en transmettant la passion et l’intégrité
des pionniers, aux cinéastes de demain.
Fêter les 50 ans des JCC, c’est avant tout sauvegarder des pans entiers de notre mémoire en
rappelant que le premier des Festivals d’Afrique et du Monde Arabe reste celui qui défend avec
autant de vigueur des mots d’ordres qui résonnent encore secrètement dans le coeur des cinéastes
malgré les vicissitudes des temps présents. Avec une ambition de promouvoir les cinémas naissants, les
cinémas fragiles, les films précaires et les auteurs originaux et audacieux, le festival est devenu le fer
de lance des cinémas du Sud du monde en général.
50 ans de festival et de dialogue inlassable entre les pays d’Afrique et du Monde Arabe qui ont
révélés au monde entier des noms comme : Sembéne Ousmane, Tewfik Salah, Youssef Chahine, Med
Hondo, Souleymane Cissé, Gaston Kaboré, Merzak Allouache, Mohamed Malas, Michel Khleifi, Nacer
Khémir et tant d’autres qui à l’époque faisaient leurs premiers pas et qui, après leur participation aux
J.C.C, sont devenus de très grands noms.
En accueillant à Tunis les réalisateurs, producteurs, acteurs, arabes et africains qui ont été témoins de
cette passionnante aventure, le festival se doit de les honorer particulièrement, ceux encore en vie,
qui ont accompagné le fondateur, feu Tahar Chériaa et ses compagnons de la Fédération Tunisienne
des Ciné Clubs.
Pour organiser ce 50ème anniversaire nous avons tenu à associer une institution historique du cinéma
africain, elle aussi née à Tunis en 1970, la FEPACI (Fédération Panafricaine des Cinéastes). Nous avons
également sollicité la participation de la Fédération Africaine des Critiques Cinématographiques pour
qu’elle soit de la fête car la critique cinématographique a énormément contribué à faire connaitre
nos cinémas et c’est pourquoi nous voulons à cette occasion, rendre hommage à de grands critiques
disparus qui ont avec beaucoup d’enthousiasme assuré le rayonnement de notre festival ainsi que la
promotion des films arabes et africains les plus novateurs.
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Nous pensons avec émotion à l’égyptien Samy Salamouny, au Burkinabé Jean Servais Bakyono,
à l’algérien Abdou B et au critique Français Serge Daney qui ne s’est jamais départi de notre cause.
Le samedi 29 Octobre, un programme spécial, riche en événements, proposera différentes activités
cinématographiques et musicales. Ce sera la journée du cinquantenaire, une journée à marquer d’une
pierre blanche car ce sera l’occasion d’envisager l’avenir des cinémas arabes et africains en puisant
à la source d’un rêve d’indépendance, de fraternité et de paix.
Cette journée de la Mémoire débutera par l’ouverture d’un colloque international où une pléiade
d’invités sera conviée à faire le point et à réfléchir sur la meilleure manière de sauvegarder le
patrimoine cinématographique très menacé des pays du Sud et se poursuivra de manière festive
par des rétrospectives en hommage a des grands auteurs du cinéma arabe et africain (Djibril Diop
Mambéty, Youssef Chahine et Idrissa Ouedraogo), des projections de films, des concerts de musique,
des expositions et, des rencontres avec les initiateurs du cinéma en Tunisie, en Afrique et dans le
Monde Arabe comme Dikongue Pipa (Cameroun), Mohamed Malas (Syrie), Ola Balogun (Nigeria),
Michel Khleifi (Palestine), Timité Bassori (Côte d’Ivoire), Kaled Sadik (Kuweit), Djingarey Maiga (Niger).
Ce sera une grande occasion pour les nouvelles générations de découvrir des oeuvres et des auteurs
qui ont marqué la longue histoire de ce pionnier des festivals du Sud du monde. Une manière de
s’orienter, d’identifier les vrais repères pour ne pas perdre le Sud et envisager dignement l’action.
Le programme présentera une centaine de films ; non seulement des documentaires historiques
sur le festival et sur des pionniers comme Sembéne Ousmane, Sotigui Kouyaté, Gadalla Gubara,
Moustapha Alassane mais aussi et surtout plusieurs oeuvres cinématographiques majeures qui sont
désormais inscrites en lettres d’or et pour toujours dans le palmarès des Journées Cinématographique
de Carthage.
Mohamed Challouf