Hany Abu Assad, Cinéaste des héros du quotidien
Le réalisateur palestinien Hany Abu Assad, connu notamment pour son film "Omar" qui a remporté le Tanit d'or aux Journées Cinématographiques de Carthage en 2014 et "Paradise Now" qui a raflé le Golden Globe Award du meilleur film étranger en 2006 ainsi que pour les deux nominations de "Paradise Now" et de "Omar" pour représenter la Palestine aux Oscars du meilleur film en langue étrangère, fait partie des figures les plus marquantes du "Nouveau Cinéma Palestinien", cinéma qui a cherché à dépeindre les préoccupations du peuple palestinien en s’appuyant sur des personnages pétris de fragilité humaine et de contradictions.
Né à Nazareth en Palestine le 11 octobre 1961, Hany Abu Assad s’installe aux Pays-Bas en 1980 où il poursuit des études supérieures dans le domaine de l'ingénierie aéronautique. En 1990, il décide de faire ses premiers pas au cinéma en fondant "Ailoul Production ", une boîte spécialisée dans la production cinématographique et débute sa carrière en 1992 avec "Paper House" un court-métrage primé dans plusieurs festivals internationaux. Suivirent d’autres films tels que son premier long-métrage, "The Fourteenth Chick" en 1998, suivi de "Nazareth 2000" en 2000, "Ford Transit ", "Rana’s Wedding", "Paradise Now", "Omar" et "Le piège de Huda". Quant à son expérience hollywoodienne, elle comprend deux films : "The specialist" en 2012 et "La Montagne entre nous" en 2017.
La spécificité du cinéma d’Abu Assad réside dans l’interrogation de la réalité palestinienne, puis sa transformation en histoires cinématographiques qui, en dépassant les clichés stéréotypés antérieurs des combattants "Fidayine" toujours victorieux, révèlent et témoignent de l’humanité d’un peuple qui se bat contre une occupation israélienne des plus féroces et des plus oppressives. Il dit à ce propos : "Nous avons perdu la terre et notre contrôle sur la terre, il ne reste donc plus qu’à protéger la cause, protéger le récit et protéger notre histoire".
Ses films reflètent généralement l'ampleur de l'injustice à laquelle le peuple palestinien est confronté depuis le début du processus de dépossession de ses terres en 1948, en s'inspirant de faits réels ou de sujets considérés tabous, comme le film "Le piège de Huda" (2021) qui raconte l'histoire de Huda, propriétaire d'un salon de coiffure qui recrute ses victimes parmi les clientes de son salon pour en faire des agents au service des renseignements israéliens.
D’une façon plus générale, les films de Hany Abu Assad donnent au spectateur la possibilité de découvrir l'étendue des drames de l'occupation israélienne et la force des résistances individuelles et collectives à travers un langage cinématographique qui accorde de l’importance au rythme et au cadrage, mais aussi avec une argumentation narrative qui donne de la puissance à l'intrigue dramatique tout en insistant sur les particularités de l'espace géographique assiégé par les blindés, les barrages de contrôle et les différents moyens de surveillance et de répression.
Grâce à sa diffusion dans les cinémas arabes et occidentaux et sur diverses plateformes numériques, le cinéma d’Abu Assad offre une visibilité à un peuple qui vit dans en état de siège et qui souffre d’un embargo médiatique des plus durs. Les prix remportés par ses films constituent une reconnaissance et des victoires précieuses qui viennent défier la domination et les violations israéliennes en terre de Palestine.
La 34ème édition des Journées Cinématographiques de Carthage rend hommage au réalisateur palestinien Hany Abu Assad pour sa persévérance à présenter des récits visuels soulevant des questions existentielles d’héros palestiniens dans leur vie quotidienne. Ses films reflètent également l’atrocité des exactions israéliennes et son impact sur la vie d’un peuple qui ne désire que se libérer du joug de l’occupation.