غاستون كابوري
Homme engagé, Gaston J.M. Kaboré n’a pourtant pas tourné un film militant. Wênd Kûuni raconte simplement la vie d’un jeune africain du milieu rural frappé de mutisme par la suite de la mort douloureuse de sa mère. Le cinéaste burkinabé a opté pour un retour aux sources. Wênd Kûuni a été tourné avec des acteurs non professionnels –
Gaston J.M. Kaboré : Je pense qu’à partir du moment où il s’agit d’une oeuvre de création d’une sphère culturelle différente, on ne peut pas s’attendre à ce qu’il y ait une communication totale. Parfois l’impossibilité de tout comprendre marque le début du vrai dialogue dans la mesure où on respecte ce qu’on n’arrive pas à comprendre tout à fait.
Les spectateurs africains ne comprennent pas tous la même chose face aux films africains. Parfois, leur compréhension va même audelà de ce que l’auteur a voulu mettre dans son film. On a toujours envie qu’il y ait la meilleure compréhension de l’oeuvre qu’on présente mais cette perfection est idéale et n’est atteinte à aucun moment. À mon avis, un cinéaste, même concernant son film, n’a pas réponse à tout. Il y a à l’intérieur d’une oeuvre, une fois qu’elle est faite, des choses qui ne vous appartiennent plus.
« Quand je voyais des films à Paris, des films d’Hitchcock, j’étais toujours fasciné par la notion de suspense. Il est là pour captiver l’attention, c’est un jeu de cache-cache entre l’histoire et le spectateur, mais à la fin moi je suis toujours déçu. J e me dis : ‘Ah ! Ce n’était que ça I’ Dans les sociétés occidentales bourgeoises, c’est comme si on cultivait la certitude : on a besoin d’un certain nombre de valeurs-repères. Et ça se reproduit dans les films. Moi, je n’ai pas besoin de certitudes, ou de suspense. La construction de Wênd Kûuni est peut-être maladroite, mais c’est la mienne. Si je l’avais travaillée davantage dans le sens du suspense, ce serait une faute... » (Gaston J. M. Kaboré, Libé - ration. 8 mars 1984)
Par Michel Coulombe
(Extraits)
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